La verrerie fondée par Jacob Krummenacker, comptait de nombreux ouvriers jusquà la révolution française . A ce propos l'abbé Faust, curé du village écrivait: << Le chef de cette famille nombreuse se jeta tête baissée dans l'entreprise dont il venait de prendre l'initiative. Elle était presque gigantesque pour lui: il avait à faire le bûcheron, l'architecte, le maçon, le charpentier, le menuisier, le chimiste, le directeur d'atelier, le maître et contremaître de place, le commis aux achats et aux ventes, le cultivateur, le voiturier, etc... en un mot le factotum le plus universel qui se pût imaginer et il ne savait pas écrire son nom. Néanmoins le succès rapide, étonnant, récompensa son courage et celui de ses compagnons, les maîtres verriers: Jean Kremer, Jean Henry Engel et Joseph Fischer.>> Le début de l'actuel Guntzviller sera clairement prouvé par le bail du 9 octobre 1700. Traduction en sera faite le 6 VIII 1814 par Mr Frédéric Lameyer interprète juré auprès de la cour de cassation, la cour royale et le tribunal de commerce. Il y est écrit que le village Guntzviller est à présent si considérable que l'évêque de Metz, après les visites faites aux maisons de l'ancien Guntzviller et à l'ancienne église où l'on a trouvé des fonds baptismaux et autres marques de mère église paroissiale n'a fait aucune difficulté pour y ériger une cure. Jacob était alors agé de 46 ans, sa femme Agathe en avait 49. Ils avaient douze enfants, six filles et six garçons. L'ainé Jean-Georges avait quinze ans. Quoiqu'illettrés, les affaires de nos verriers prospèrent. Six ans à peine après le bail du 9 octobre 1700, le comte de Lutzelbourg trouve que les clauses sont bien trop avantageuses pour les fermiers. Il regrette en particulier de les avoir déchargés de tout impôt envers le souverain de l'Etat et le Seigneur du Pays. Leur entreprise ne craint pas la concurrence des nombreuses autres verreries installées dans les villages environnants. Elle ne cesse de prospérer et avec elle le village de Guntviller qui s'agrandi. Nul autre village de tout le canton ne fait aussi bien. En 1728, nos verriers font en commun l'acquisition considérable du "Friesenwald". Pour ce faire ils versent 1000 livres au sieur Jean Frise de Saverne et 1300 livres au seigneur François Ignace Burguin. Ces 2300 livres représentent une coquette somme pour des ouvriers qui viennent de démarrer une verrerie dans le village. Ils défrichent le bois, en font des terres arables et des prés.L'endroit s'appelera "Friesenfeld". L'année suivante, le 27 septembre 1729, ils acquièrent auprès du comte de Lutzelbourg tout un finage de 300 arpents, appelé "le Hommertban" ou "Hommerberg". Nos verriers ont l'air de faire fortune,leurs bénéfices leur permettent de payer les constructions de l'usine, du village plus les nouvelles acquisitions de terres. La réussite de nos verriers faisait d'eux les "maires du pays". Les villages voisins devenaient de plus en plus jaloux. Les communes de Hommarting, Réding, Eich se sentant lésées par le défrichement du Hommertberg par le droit de pâture qu'elles prétendaient avoir dans toutes les forêts du comte de Lutzelbourg situées sur le ban de Guntzviller se pourvoyaient déjà en 1731, par devant le conseil d'Etat contre le dit Seigneur pour avoir concédé ce défrichement . Et comme l'écrivait l'abbé Faust: << Elles demandaient le retour à l'état de bois de tous les terrains défrichés, et chose plus étonnante, allaient même jusqu'à provoquer la destruction du nouveau village.>> La cause fut tranchée par l'arrêt du 23 septembre 1734, en conseil d'état. Les communes voisines étaient déboutées de leur action contre le conte et l'on fixait à ceux de Guntzviller le nouveau lot de bois qu'ils pourraient défricher. Lors d'un deuxième pourvoi en justice, le 4 décembre 1736, la requête des trois communes fut à nouveau rejetée. Les communes de Réding et d'Eich furent condamnées aux dépens. La commune de Hommarting s'était désistée au cours de la procédure. Mais les gens de ces communes voulaient emporter par la force ce qui leur avait été refusé par les tribunaux. 1736 et 1737 furent deux années tumultueuses et riches en évènements. Il s'en suivait des batailles rangées entre garde champêtres de Hommarting et de Guntzviller, des confiscations de troupeaux de porc qui étaient ensuite vendus aux enchères, etc... Pour conclure ce chapitre, un résumé de l'abbé Faust qui écrivait: -Les verriers de Guntzviller, tout en fabriquant le verre, s'acharnèrent de plus en plus au fur et à mesure de leurs défrichements, aux travaux de l'agriculture. Ils n'éteignirent pas leurs fours dès l'épuisement des forêts, après 50 ou 60 ans de fabrication, comme ils en avaient le droit en vertu de l'acte de 1700; on peut cependant admettre qu'ils ne les conservèrent pas au delà de l'époque révolutionnaire, et qu'alors ils devinrent en définitif ce qu'ils sont aujourd'hui: uniquement des cultivateurs. Le dernier évènement et la dernière joie qu'a put vivre Jacob notre aïeul, fondateur de la verrerie et du village, c'était sans conteste l'ordonnance du 11 juillet 1724 par laquelle Monseigneur de Coislin, évêque de Metz autorisait la construction de l'église.
A GUNTZVILLER